Athéna, vierge guerrière et plus tardivement déesse de la sagesse, est le symbole de la quête, de la puissance de l’intelligence discernante qui contribue à la croissance de l’être intérieur afin de lui soumettre l’être extérieur.
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Athéna incarne ce que l’on appelle « le maître intérieur ». C’est le sens des consonnes qui forment son nom, Θ+Ν, la puissance qui veille à « l’évolution de ce qui naît à l’intérieur » (en fait, elle s’appelait originellement Athenaia, Θ+Ν+Ι, « la conscience en évolution à l’intérieur »). Même l’amour, représenté par Aphrodite, ne peut être le moyen initial de la quête, ni prendre sa direction, car l’amour, tel que l’homme le conçoit, est totalement mélangé avec le mental et le vital. Ce qui nous oblige à considérer la définition d’Homère qui pose l’amour comme un processus de l’évolution vers l’union – sous une impulsion venue du supraconscient car Aphrodite pour lui est fille de Zeus et Dioné – et non celle d’Hésiode qui considère l’Amour à l’origine de la manifestation, lorsque la déesse surgit de l’écume de la mer. C’est la raison pour laquelle Sri Aurobindo affirme que la Vérité doit être réalisée dans l’humanité avant l’Amour. (En fait, Hésiode donne l’image de l’Amour émané de l’Absolu, mais donne ensuite à Aphrodite plusieurs noms – Cythérée, Cyprogénie, et Philomédée – qui laissent entendre qu’il considérait aussi l’amour en évolution.)
Athéna est fille de Zeus, donc une expression du supraconscient (au niveau surmental), et de Métis, la déesse de « l’Intelligence » divine, fille du titan Océanos, lequel a généré tous les courants de conscience-énergie agissant dans la création.
Voir l’Arbre Généalogique 17
La conception, la gestation et la naissance d’Athéna, jusqu’au moment où elle jaillit en armes de la tête de Zeus (fendue, aux dires de Pindare, d’un coup de hache par Héphaïstos, le forgeron divin), ont déjà été traitées lors de l’étude de Zeus.
La période de la grossesse de Métis, avant qu’elle ne soit avalée par Zeus et jusqu’à la naissance d’Athéna, correspond à la phase préparatoire à l’entrée sur le chemin durant laquelle le chercheur s’efforce de découvrir sa voie ou son maître. Aussi conscient puisse-t-il être à ce moment de la quête, il ne peut encore concevoir un niveau d’évolution au-delà des plus hauts plans du mental. C’est pourquoi Zeus est « averti » par Gaia et Ouranos qu’il sera détrôné par le second enfant que lui donnera Métis : il y a une certaine « prescience » provenant à la fois du corps et de l’esprit que le mental n’est pas le sommet de l’évolution.
En avalant Métis en tout premier, le supraconscient s’identifie à « l’intelligence discernante suprême » comme outil d’évolution. Cette identification se maintiendra le temps de la domination d’Athéna dans la quête, jusqu’à ce que l’être psychique gouverne les trois plans inférieurs.
En extrapolant, l’étape suivante de l’évolution devrait être précédée par une régurgitation de Métis afin de dissocier la conscience humaine de l’Intelligence discernante, celle-ci étant désormais acquise, et permettre la fécondation puis la venue au monde du deuxième enfant de Métis.
Les autres unions majeures de Zeus avec des déesses, unions qui précèdent la naissance d’Athéna, correspondent à un appel du supraconscient à la mobilisation de l’être dans certaines directions particulières. Nous avons aussi déjà mentionné qu’elles correspondent probablement à des étapes symboliques de la quête dans le rapport du chercheur au Divin. Nous les avons détaillées avec Zeus et n’en reprenons ici que les grandes lignes.
Thémis : la soumission aux lois divines
Eurynomé : la soumission à l’ordre juste, à l’harmonie divine.
Déméter : le travail sur soi vers l’union.
Mnémosyne : la réappropriation de la mémoire.
Léto : l’éveil de la conscience à l’être psychique et à ses manifestations.
Héra : l’adéquation au mouvement du devenir, la puissance qui veille à ce que rien ne reste en arrière.
Lorsque le chercheur est prêt, Athéna peut jaillir, obligeant à un retour sur soi par une prise de conscience que le monde ne peut être changé si l’on ne commence par soi-même. Émergeant de la tête de Zeus, elle doit préparer le terrain entre le niveau le plus haut du mental – le surmental qui appartiendra pour longtemps encore au supraconscient – et l’étape suivante, le supramental.
En effet, au niveau de l’humanité dans son ensemble, il semblerait que le passage vers le supramental doive s’effectuer par la conquête des plus hautes couches du mental, même si, d’un point de vue individuel, cela puisse se produire par des chemins très différents selon chacun. L’action du supramental, pour s’installer, semble imposer que les couches inférieures de l’être soit suffisamment purifiées et libérées, ce qui ne peut se produire sans l’aide des plus hautes couches du mental et des puissances qui y travaillent. C’est la raison du processus de la quête telle qu’elle est proposée dans la mythologie, qui consiste en une suite d’ascensions et d’intégrations, un va-et-vient constant entre le haut et le bas, entre les mondes de l’esprit et ceux de la matière, afin de faire descendre au fur et à mesure la lumière des plans nouvellement conquis dans les couches correspondantes du vital et du corps.
Les anciens ont donc pressenti deux étapes dans cette transition du mental au supramental : la première, conduite par la guerrière Athéna « au moins aussi sage et forte que son père » et « dont la naissance emplit de crainte les autres dieux ». Elle doit permettre le contact et l’union avec la Réalité intérieure et le Suprême au-dessus, favoriser la croissance de l’être psychique et la soumission de la nature extérieure à celui-ci.
La seconde étape, sous la gouverne de « l’enfant à naître » (de Métis), permettra de faire descendre dans les plans inférieurs les forces du plan divin ou supramental, auquel le chercheur sera uni, et cela afin que ces forces agissent et transforment le mental, la vie et le corps, pour une vie divine dans un corps divinisé. Étape exigeant la réalisation d’une totale transparence entre le supramental, et la matière. D’où l’annonce par les dieux suprêmes, Gaia et Ouranos, d’un deuxième enfant à naître, « un fils au cœur plus que violent qui régnera sur les dieux et sur les mortels ». Car ce sera l’action d’une force agissant dans « l’exactitude » et donc plus « intransigeante » aux yeux des hommes, en accord avec la lumière d’Apollon et l’intégrité d’Artémis devenus de plus grands dieux que les enfants d’Héra.
Athéna est donc la force guerrière de préparation de la nature à la réception de la force transformatrice supramentale provenant d’un plan de Vérité situé bien au-delà des dieux.
Zeus n’a pas ce caractère permanent d’Absolu. Il ne dispose que d’illuminations de Vérité et de la Puissance que lui ont données les Cyclopes, les éclairs et la foudre.
Il n’a pas non plus la vision totale, la Connaissance totale de la Vérité, l’Omniscience qui est le privilège des Cyclopes, ni la puissance d’action simultanée en tous points des Cent-Bras, l’Omnipotence.
Lorsqu’il avale Métis, la déesse « qui en sait plus que tous les dieux », Hésiode nous dit seulement que cela doit l’aider « à mieux discerner ».
Mais celui qui veut accélérer le processus d’évolution, la nature prenant d’ordinaire son temps, se heurte à toutes les forces qui ont stabilisé l’état actuel, souvent depuis des temps immémoriaux, par des habitudes, des comportements, des réactions coutumières, des façons de sentir, de penser, des milliers de choses conscientes ou subconscientes qui résistent à la volonté de changement. C’est pourquoi la quête est un combat et Athéna une guerrière. Et c’est pourquoi traditionnellement, toutes les descriptions de la quête spirituelle utilisent l’image du guerrier. Il s’agit, bien sûr, de combats intérieurs et non extérieurs, même si le chercheur ne doit jamais fuir ces derniers lorsque cela lui est demandé. Car le chemin préconisé par la mythologie grecque comme par les Védas passe aussi par une insertion dans le monde et la participation à ses luttes : le chercheur de vérité ne doit pas fuir le monde, mais remplir la tâche qui lui incombe et combattre à l’extérieur quand il y est intérieurement appelé, gardant à l’esprit que le résultat ne lui appartient pas. Mère précise que ce sont les anciennes méthodes de Yoga qui demandent l’isolement et la solitude mais que l’Absolu doit être trouvé désormais dans le travail et dans la relation avec les autres.
Le combat commence dès le premier pas sur le chemin, dès le retournement vers l’intérieur. C’est pourquoi Athéna est revêtue de son armure et de ses armes dès sa naissance.
La déesse à peine née ravit à Poséidon la souveraineté sur la ville d’Athènes.
Poséidon était arrivé le premier en Attique et, frappant de son bâton l’Acropole, avait fait apparaître un étalon noir, invincible au combat, ou selon d’autres une mer salée. Athéna vint ensuite, planta un olivier et réclama la souveraineté. Tous les dieux de l’Olympe furent appelés pour arbitrer la querelle et tranchèrent en faveur d’Athéna.
La quête se prépare souvent au niveau du subconscient vital (le royaume de Poséidon), avant que le vrai travail de purification ne commence (avec Athéna). L’olivier est en effet symbole de pureté tandis que l’étalon est symbole d’une très grande force vitale non maîtrisée ou du moins non soumise au psychique car il est noir. La quête est donc déclarée par les dieux comme un chemin de purification et non plus comme une recherche de pouvoirs ainsi que cela pouvait l’être précédemment. Il y a en effet un très grand nombre de chercheurs qui s’arrêtent lorsqu’ils ont acquis certains pouvoirs dans le vital et se posent alors en gourous.
Comme de nombreuses autres divinités, Athéna connaît l’art de dompter les chevaux, qui est celui de la maîtrise vitale. Certains disent qu’elle donna à Bellérophon, dompteur de la Chimère (de l’illusion), une bride céleste pour son cheval Pégase.
Son surnom le plus courant est Pallas-Athéna. La signification de Pallas est « s’élancer », sans doute en signe de son impétuosité. Avec les lettres structurantes, c’est la déesse « qui réunit ou équilibre les éléments séparés (Π+ΛΛ)» et donc sur le plan mental, la raison et l’intuition, ou bien celle « qui apporte la stabilité de la libération en l’esprit ».
Le Palladion était une statue de la déesse qui protégeait celui qui le possédait. Dans la structure de son nom, aux idées d’équilibre et de libération s’ajoute celle d’unité (le delta). Ulysse dut le ravir à Troie dès le début de la guerre, faute de quoi la cité ne pouvait être prise : tant que le chercheur est accroché à la réalisation du Divin en l’esprit, et même si il a réalisé le Divin intérieur (par l’union consciente avec le psychique), le chemin évolutif lui est fermé.
Athéna a de nombreux autres surnoms :
Athéna Promachos, « celle qui met le combat de la quête au premier plan ». C’est à ce titre qu’elle intervient à de très nombreuses reprises dans les aventures des grands héros Jason, Héraclès et Ulysse.
Stheneia : l’évolution de la force intérieure.
Areia : la combattante ou « celle du mouvement juste de la conscience ».
Comme Artémis, elle est Kourotrophos, celle qui veille sur les jeunes enfants, les « émergences spirituelles ».
Ergane : « l’industrieuse » et Polias, « la déesse de la cité » : la quête demande un travail patient, laborieux et méthodique sur sa propre nature, sa personnalité avec ses multiples composantes (la cité). Aussi Athéna est-elle la protectrice des villes (travail d’organisation de la conscience) et la patronne des artisans (de l’habileté dans les œuvres), et tout particulièrement de ceux qui filent et qui tissent en leur demeure (préparation et élaboration dans la conscience intérieure). Elle sait la stratégie (comment avancer sur le chemin), elle conduit à la sagesse et même jusqu’à l’égalité (Pallas), elle est de bon conseil (si l’on est à l’écoute du maître intérieur), la protectrice des arts et des sciences (de ceux qui cherchent l’Absolu à travers les hauteurs de l’esprit qui laissent filtrer la beauté – les arts – et ceux qui la cherchent dans la matière – les sciences)
Sur son bouclier, ou sur l’Égide qu’elle partageait avec Zeus, afin d’effrayer ses adversaires, elle mit la tête de la gorgone Méduse que lui avait donnée Persée. Méduse est le symbole de la peur. Athéna est donc la puissance qui soutient la lutte contre les peurs, cause de tous les « attachements ».
Mentionnons aussi le mythe d’Arachné, rapporté par Ovide.
Celle-ci prétendit savoir mieux tisser qu’Athéna et lui lança un défi que la déesse, non sans l’avoir mise en garde contre sa présomption, accepta.
Athéna n’eut rien à redire au travail d’Arachné, mais fut offensée par le motif qu’elle avait choisi, les amours des dieux. Elle la punit en la battant avec sa navette, puis, pour lui éviter de se pendre, la transforma en araignée.
Pour chaque histoire de métamorphose dans laquelle un être humain est ramené au stade animal, le chercheur doit apprendre une leçon. Cette légende nous dit que lorsque la juste évolution de « la concentration ou du rassemblement de l’être » (selon les lettres du nom d’Arachné) est réussi dans un domaine donné, même si cela mène à d’habiles réalisations, cela ne doit pas conduire à être présomptueux et s’occuper de choses qui ne sont pas en rapport avec le travail exigé sur soi-même (les amours des dieux). L’araignée tisse sa toile parfaitement, sans aucune fioriture, dans le but de se nourrir, et non pour briller.
Les attributs d’Athéna (la lance, le casque et l’égide) sont les symboles du combattant de la vérité : justesse, courage, contrôle et silence mental (casque), discipline, intrépidité et besoin de croître (égide).
L’arbre qui lui est dédié est l’olivier, symbole de sagesse et de purification – et donc de la libération – et de la paix qui mène à l’équanimité. On peut lui ajouter celui de la fécondité dans la mesure où le travail intérieur porte ses fruits.
Son animal symbolique est la chouette, un oiseau qui voit la nuit : le chercheur de vérité doit apprendre à voir la nature exacte de l’ombre, peut-être aussi à discerner sa route dans l’obscurité. Ainsi, étant à la fois déesse de la raison et de l’intuition (la chouette), elle est la déesse du discernement.
Les mythes disent aussi que la déesse rendit aveugle le devin Tirésias qui l’avait vue nue, lui accordant en contrepartie le don de prophétie : c’est seulement lorsque le chercheur comprend l’essence de la quête et qu’il a eu l’obligation de se tourner vers son monde intérieur, qu’il peut vraiment accéder à l’intuition.
Au mariage d’Harmonie et de Cadmos, sur le chemin de la purification qui conduit à l’exactitude, elle offrit la robe, signe « de la consécration totale à la recherche du Réel ».
Les fêtes qui lui sont consacrées sont les Panathénées, fêtes de ceux « qui donnent tout à Athéna », c’est-à-dire la mise à l’honneur des chercheurs de vérité qui se sont entièrement consacrés à la quête de la Réalité intérieure.
Athéna en nous
Athéna est une énergie guerrière faite de courage, endurance, détermination et consécration. Cette énergie qui stimule notre quête se fonde sur l’intelligence la plus haute (Métis), nous incite à nous libérer de la peur et de tous les obstacles qui entravent notre progression, et à nous battre contre notre inertie et notre « tiédeur». Elle insiste sur ce que nous devons changer, nous rappelle sans cesse au travail quand nous nous endormons. Elle est exigeante et ne demande rien moins qu’une consécration totale à la quête.
Elle est aussi une grande organisatrice de la conscience, par intégration des expériences.
Toujours elle incite à se tourner vers l’intérieur.
C’est elle qui, pendant sa gestation, nous prépare au chemin.
Tant que la quête reste velléitaire, le guerrier ne peut apparaître vraiment.
Il faut désirer profondément le changement pour qu’il advienne.
C’est elle qui nous fait avancer sur le chemin de la purification, cette « pureté » si chère aux anciens Grecs, qui est de mettre chaque chose à sa place, sans mélange.