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Pélias ayant cessé de croire au retour des Argonautes voulut tuer le père de Jason, Aéson, mais celui-ci demanda à se donner lui-même la mort. La mère de Jason, Polymède, se pendit alors en laissant un fils en bas âge, Promachos, que Pélias tua.
Nous avons dit que le couple Aéson-Polymède représente le chercheur dont le mental individualisé puissant dirige la quête selon ses propres conceptions et dans une certaine dispersion. Avant même que se produise l’illumination, il passe par une phase où « l’ignorance de son propre chemin » qui conduit à la volonté de bien faire, qui est en fait aussi une résistance à l’évolution juste (Pélias) le contraint à retirer au mental la direction de la quête (ce qui est illustré par le suicide des deux membres du couple). C’est ce lâcher-prise incluant l’abandon des derniers « remparts » élaborés par ce travail mental brillant (le meurtre de Promachos « la dernière ligne de défense ») qui permet en fait l’expérience de l’illumination.
Ce fut pour se venger des torts subis pendant la quête ainsi que de la mort de ses parents et de son jeune frère Promachos que Jason, avec l’assistance de Médée, complota la mort de Pélias.
Médée convainquit les filles de Pélias qu’elles pouvaient rajeunir leur père (ou peut-être seulement Pisidicé, Pélopia et Hippothoé, car certains auteurs prétendent qu’Alceste refusa de porter la main sur lui). Dans ce but, elle découpa un vieux bélier, en fit bouillir les morceaux avec des herbes et des potions puis le ramena à la vie sous la forme d’un jeune agneau. Très impressionnées, les trois princesses dépecèrent leur père et mirent les morceaux dans un chaudron. Mais Médée omit volontairement d’ajouter les herbes nécessaires.
Après ce meurtre, Jason confia le royaume à Acastos (fils de Pélias) qui avait exilé ses propres sœurs après la mort de leur père à tous.
Pour Phérécyde, la quête de la Toison d’Or avait été entreprise à l’instigation d’Héra qui savait que le héros reviendrait accompagné de Médée, ce qui entraînerait inévitablement la mort de Pélias. L’intervention du supraconscient (Héra, comme Zeus, appartient au surmental et donc au supraconscient) est organisée en effet de sorte que la première grande expérience spirituelle mette fin automatiquement à l’errance ignorante du chercheur qui n’a pas encore trouvé sa voie ou sa tâche, ainsi qu’à ceux de ses engagements seulement guidés par une « bonne volonté ignorante » qui empêchent en fait une juste évolution (la mort de Pélias).
Les filles de Pélias, Pisidicé « celle qui tente de se persuader (ou de persuader) de la juste manière d’agir », Pélopia « celle dont la vision est partielle » et Hippothoé « celle qui a un vital actif » sont des résistances issues de cette ignorance et qui veulent la maintenir active. Le chercheur est encore en effet attaché à ses vieux schémas et agissements malgré la puissante expérience intérieure qui vient d’avoir lieu.
Seule Alceste « une forte rectitude (sincérité) » pressent que cette ignorance doit disparaître.
Lorsque Jason s’unit à Médée « le dessein de l’âme », l’ignorance du but de vie disparaît et le chercheur peut jeter un regard en arrière et voir que rien dans sa quête n’a été inutile. Il prend acte du chemin parcouru et de l’aide apportée par le subconscient (Pélias est fils de Poséidon).
C’est pourquoi des Jeux en l’honneur de Pélias furent organisés par son fils Acastos « celui qui est très sincère ». Mais les anciens schémas de comportement doivent d’abord quitter le devant de la scène, et c’est pourquoi il commença par exiler ses sœurs.
Seul Hygin a conservé la liste des vainqueurs qui, à quelques exceptions près, sont les compagnons de Jason cités au début de ce chapitre : Calais et Zétès, les Dioscures Castor et Pollux, etc
Parmi les participants, il importe de mentionner un Glaukos homonyme : vaincu par Iolaos, il fut dévoré à l’issue des jeux par les chevaux de son attelage. En effet, comme il les avait habitués à manger de la chair humaine de façon à les rendre plus agressifs dans la bataille, quand cette nourriture vint à manquer durant les jeux, ils le dévorèrent.
Le nom Glaukos se rapporte à une « brillance ». Et comme ce personnage est habituellement identifié au fils de Sisyphe, cela fait de lui le symbole d’un « intellect brillant », sûr de lui-même jusqu’à la présomption, qui supporte et renforce l’expression du vital (avant la mort de Pélias, Glaukos nourrit ses chevaux de chair humaine afin de rendre ceux-ci plus agressifs). Mais après la première expérience de contact intérieur, cette « présomption » doit s’effacer devant « la voix de la conscience », Iolaos.
Les Anciens n’ont pas fait figurer ces célébrations parmi les Grands Jeux Panhélleniques, sans doute pour éviter aux chercheurs la tentation de donner trop d’importance à la première grande expérience de contact.
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